Société | Travailler sans aucune charge jusqu'à 6.000 euros
Une idée risquée du gouvernement

Pour favoriser les activités occasionnelles, certains ministres veulent permettre à chacun de gagner jusqu'à 6.000 euros par an nets de tout prélèvement. Une mesure à bien encadrer...

Dans sa loi fourre-tout de fin d'année, dite de relance, le gouvernement fédéral a intégré une dispense de toute charge et impôt pour les activités occasionnelles, à concurrence de 1.000 euros maximum par mois et 6.000 euros par an. L'idée a soulevé de nombreuses critiques, en particulier de l'UCM qui a été auditionnée en Commission de la Chambre sur le projet de loi. À tout le moins, des éclaircissements sont nécessaires avant l'entrée en vigueur, bizarrement prévue au 20 février 2018.

Dans l'état actuel, le projet du gouvernement vise trois types d'activités. D'abord le travail associatif dans le non-marchand, au profit des seniors ou des malades, au bénéfice d'asbl culturelles ou sportives, etc. Ensuite les "activités occasionnelles rémunérées entre citoyens" : garde d'enfants, cours particuliers, petits travaux d'entretien, aide aux tâches ménagères, etc. Enfin les prestations effectuées via les plateformes d'économie collaborative, pour lesquelles un impôt forfaitaire de 10 % jusqu'à 5.100 euros maximum a été instauré et disparaîtrait.

Des avantages indéniables

Le secteur non-marchand souhaitait une telle initiative. Pour les asbl, l'idée paraît séduisante. La limite est claire et en deçà de cette limite, il n'y a aucun frein à l'activité.

Côté prestataires, dans le projet, l'exonération est réservée aux personnes qui ont déjà une activité professionnelle suffisante pour ouvrir l'accès à l'ensemble des droits sociaux. Pour les fonctionnaires et les salariés, c'est une alternative au statut d'indépendant à titre complémentaire. Cela permet par exemple de tester une activité via l'économie collaborative avant de se lancer.

Attention dangers

L'exonération fait peser une menace sur le financement de la sécurité sociale. L'administration des Finances a estimé que le trou dans les recettes serait de 109 millions d'euros en cas d'application complète de la règle des 6.000 euros dans les trois domaines envisagés (asbl, coups de main et plateformes). 

Pour l'UCM, il est positif de fixer des règles claires pour l'économie collaborative. Le phénomène ne peut pas être ignoré, il doit être encadré. Les plateformes peuvent être un tremplin pour une réorientation de carrière et le développement d'une activité indépendante.

Par contre, en ce qui concerne l'associatif et le service occasionnel entre citoyens, cette innovation comporte davantage de menaces que d'opportunités. Il y a un risque de glissement de l'activité confiée aux professionnels vers des personnes non taxées. Cela s'appelle de la concurrence déloyale et il n'est pas exclu qu'elle s'exerce même entre indépendants.

En Commission des affaires sociales de la Chambre, auditionnée avec d'autres organisations patronales, l'UCM a émis de sévères réserves à l'égard du projet. Le lancer en l'état, le 20 février, serait prématuré et imprudent. Vincent Van Quickenborne (Open VLD), président de la Commission et fervent partisan du projet, s'est emporté : "C'est innovant et disruptif." Matthieu Dewèvre, représentant de l'UCM, s'est défendu : "C'est très bien d'être innovant et disruptif, mais pas au détriment des indépendants."