Alpagas du Maquis

Elevage d'alpagas, tonte et transformation des fibres

Viser l'excellence et se démarquer

03/04/19

Laurence et Éric Varlet ont choisi de consacrer leur entreprise aux alpagas. Le couple élève, tond les camélidés et transforme la fibre en produits de luxe. Avec bonheur.

Isabelle Morgante

Leur parcours professionnel ne devait théoriquement pas les mener dans une ancienne ferme de Montleban, hameau du village ardennais de Gouvy. Elle est éducatrice, lui est soudeur ; aujourd'hui, ils sont à la tête d'un troupeau d'une soixantaine d'alpagas, ces camélidés apparus en Europe voici 40 millions d'années. Confondus à tort avec des lamas, résistants au froid, placides, ces animaux sont pourvus d'une fourrure de fibre dont la commercialisation est au cœur des activités de la TPE Alpagas du Maquis.

Grand Frisson, Constance, Folie Douce, Francorchamps, Céleste ou Geronimo sont autant d'alpagas élevés par Laurence et Éric Varlet sur plus de 7 hectares, loin du tumulte de la ville.

"Nous avons chacun exercé plusieurs métiers avant de nous tourner vers l'alpaga. Nous habitions à Ciergnon (Houyet) avec quelques chèvres et un âne, mais nos enfants les craignaient, se privant dès lors de jeux en pleine nature. Nous avons donc changé notre fusil d'épaule et pris nos premières informations sur les alpagas. Durant cinq ans, nous avons gardé nos vies professionnelles respectives, puis progressivement, nous nous sommes consacrés à temps plein aux animaux", résume Éric. Le couple a emmené enfants, bergers d'Anatolie, chèvres et troupeau d'alpagas voici huit mois en province de Luxembourg, à Gouvy, pour gagner à la fois quiétude et espace.

"Il nous est paru assez vite évident qu'il n'existait aucun service autour de la fibre de l'alpaga. C'est la raison pour laquelle nous avons suivi une formation à la tonte, pour faire les choses dans l'ordre. Un tondeur professionnel anglais est venu deux saisons chez nous pour tondre les bêtes vendues et nous écoler. Nous offrons ainsi un service “cinq étoiles et clef sur porte” aux clients qui nous achètent des alpagas et qui désirent les faire tondre."

Rigueur

L'alpaga représente-t-il un nouvel eldorado sur pattes ? L'Europe s'y intéresse depuis une bonne trentaine d'années, mais c'est d'abord un investissement (plusieurs milliers d'euros par tête), et bien davantage si une rosette ou une écharpe de concours a orné l'animal. C'est du temps et de la patience. Et c'est aussi un modèle financier précis. "La génétique est une alliée primordiale dans notre parcours. En sélectionnant les meilleurs individus, nous obtenons une fibre douce, fine et légère. Nous avons aussi ouvert une filière intégrée complète (élevage/tonte/transformation de la fibre en fil et produits finis)." Moins de microns compte la fibre, plus elle est précieuse. Le jeune Francorchamps, par exemple, arbore une toison (en moyenne) de 18 microns... soit un des meilleurs taux mondiaux, qui lui vaut un accès à la notoriété et aux spotlights digne d'une rockstar.

"Lorsque nous tondons nos alpagas, nous commençons par la selle, les deux flancs et le dos. Suivent l'épaule, les demi-cuisses et la base du cou. Le premier choix est tissé, le second est transformé en rembourrage pour faire des couettes, oreillers ou sur-matelas. Notre métier nous pousse à chercher de la densité mais il faut savoir que la fibre s'épaissit à chaque tonte. En introduisant la génétique dans le processus, nous parvenons à ralentir l'épaississement de la fibre, sans changer les standards physiques de l'animal."

Un alpaga heureux à la fibre soyeuse n'est pas un alpaga en surpoids. Tout excès pondéral est traqué ; chacun des membres du cheptel posant quatre pattes sveltes et légères tous les dix jours sur la balance. Logiquement, l'alimentation des alpagas est primordiale, composée de vitamines, de minéraux, de foin et d'herbe. C'est d'ailleurs à ce prix que le troupeau a gagné sa renommée internationale et arpente les catwalks des meilleurs concours. Primés à de multiples reprises, les Alpagas du Maquis figurent en très bonne place dans le "studbook" de l'espèce. Laurence est d'ailleurs revenue fin mars chargée de trophées du plus grand concours européen de produits finis !

Il s'agit là d'un enjeu capital pour le couple Varlet, puisqu'un animal est tondu une fois l'an, à l'arrivée du printemps... et qu'une femelle alpaga demande 11 mois et demi de gestation (sans manifester le moindre appétit sexuel envers ses congénères masculins). "Notre élevage fait l'objet de tellement de demandes que nous avons dû ouvrir une liste d'attente pour les animaux, déjà réservés avant même de naître et vendus partout en Europe. Nous préservons les critères de rusticité de l'animal, qui sera acheté pour un élevage, des concours, de l'alpagothérapie, ou en tant qu'animal de compagnie."

Diversification

Dans nos contrées, l'alpaga ne finit pas dans l'assiette. C'est sa toison qui est de plus en plus prisée. Et elle est une source incomparable de diversification professionnelle, le pourquoi de la formation du couple Varlet à la pratique de la micro filature. "Souvent, les éleveurs jettent les toisons. Nous avons pris le chemin inverse en récoltant ces fibres mais aussi en les exploitant, grâce à une micro filature complète importée du Canada en 2013 et mise en production l'année suivante. La tonte représente le travail d'une année. Nous ne brusquons pas l'animal et prenons le temps du travail bien fait", explique le couple.

Les fibres sont ensuite transformées dans leur atelier et deviennent des bobines vendues par pièce, des pelotes ou encore des étoles dont le succès se répand jusqu'au golfe Persique. Séduit par la qualité de ces grandes écharpes, un prince du Qatar est récemment venu dans la boutique de l'élevage pour en commander cinq exemplaires. "Nous visons l'excellence, la qualité moyenne ne nous intéresse pas. Nous voulons le meilleur produit pour donner à la fibre ses lettres de noblesse. C'est un produit de niche, que nous présentons lors des visites de l'atelier et de nos installations."

Notons enfin que la TPE Alpagas du Maquis cible le zéro déchet et l'autonomie énergétique dans son process artisanal, en recyclant la tonte non utilisée qui servira à pailler les potagers.

[ alpagasdumaquis.net }
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Accompagnement UCM
Secrétariat social

Cécile Lessire.

"Anticiper plutôt que réparer"

Au bureau de Libramont du Secrétariat social UCM, Cécile Lessire gère les prestations de 600 travailleurs, répartis en quelque 120 dossiers dont celui, unique en son genre, des Alpagas du Maquis. "Il n'y a pas de spécificité, à l'exception du domaine d'activité des époux Varlet. Tout se passe pour le mieux. Madame anticipe le volet ressources humaines, demande des informations et les assimile, ce qui se révèle la meilleure attitude. Anticiper plutôt que réparer. Heureusement, la majorité des employeurs agissent de la sorte, ce qui évite des soucis et des procédures plus longues. Le chef d'entreprise a souvent “le nez dans le guidon”, parfois tendance à ne pas donner la priorité aux questions RH. C'est là que nous intervenons efficacement, en les soulageant de ce volet et en leur permettant d'exercer leur métier."

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